L’histoire de Chito et de Pocho compte parmi les récits d’empathie les plus bouleversants jamais observés entre un être humain et un animal sauvage. En 1989, le pêcheur costaricien Gilberto « Chito » Shedden découvre, près du fleuve Reventazón, un crocodile gigantesque à l’agonie, touché par une balle à la tête. Beaucoup auraient fui, paralysés par la peur. Chito, lui, n’a vu qu’une chose : la souffrance. Et il a choisi la compassion.
Il transporte le crocodile chez lui et passe des mois à le soigner avec une patience infinie. Il dort à ses côtés, le nourrit à la main, lui parle sans cesse et gagne peu à peu sa confiance. L’animal reprend des forces. Chito le baptise Pocho. Lorsqu’il estime le moment venu de le relâcher dans la rivière, un événement totalement inattendu se produit : Pocho refuse de partir. Il suit le bateau de Chito, grimpe sur sa terrasse et montre clairement que rester est son propre choix.
S’ensuit alors une relation fondée sur le respect, l’écoute et un engagement quotidien. Chito apprend à comprendre les humeurs et les gestes de Pocho ; Pocho, lui, réagit à la voix et au toucher de Chito. Leur lien devient si profond qu’ils finissent par se produire ensemble devant le public : Chito nage aux côtés du crocodile, glisse sa tête entre ses mâchoires, et révèle une confiance qui défie l’instinct et la peur. Ce lien a un prix : Chito sacrifie du temps, de l’argent, et même son mariage. Pourtant, il ne remettra jamais en question la valeur de cette relation unique.
Pocho n’a jamais été « dompté ». Il est resté parce qu’il l’a choisi. Et ce choix a tout changé. Pendant plus de vingt ans, ils ont vécu côte à côte, démontrant que la patience et la bienveillance peuvent parfois réécrire les lois les plus anciennes de la nature.
Lorsque Pocho meurt en 2011, tout le Costa Rica est en deuil. Chito lui rend hommage à travers de véritables funérailles, afin que leur histoire ne disparaisse jamais. Aujourd’hui encore, l’héritage de Pocho demeure un message puissant : l’empathie implique une responsabilité, la confiance se mérite, et la gentillesse peut créer un pont même entre l’homme et l’animal sauvage.
